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Les vallées entre Toulouse et les Pyrénées : stagnation ou déclin économique et connexion accrue à l’agglomération toulousaine

 

Cette note est liée à la recherche collaborative « Toulouse, une “métropole” “à succès” face aux crises ».
Son objectif est d’apporter un éclairage approfondi sur certaines parties spécifiques de la métropole.
Pour lire le rapport en entier, cliquez ici.

 

Les vallées de la Garonne et de l’Ariège constituent les axes de prolongement de l’agglomération toulousaine vers les Pyrénées. Elles correspondent à deux zones d’emploi, celles de Saint-Gaudens et de Foix-Pamiers, dont les évolutions sont assez similaires, avec un accroissement du lien avec l’agglomération toulousaine, qui s’étale sur les deux axes, et une stagnation, voire même une régression de l’emploi, notamment dans l’industrie.

Saint-Gaudens

Située au sud-ouest de la Haute-Garonne, la zone d’emploi de Saint-Gaudens connaît un déclin de l’emploi entre 2006 et 2022 mais elle est de plus en plus connectée à l’agglomération toulousaine, comme en témoigne la part croissante de résidents qui travaillent dans la zone d’emploi de Toulouse.

La zone d’emploi comptait 128865 habitants en 2020 (https://www.insee.fr/fr/statistiques/2011101?geo=ZE2020-7622), soit légèrement plus qu’en 2009 (127165). Cependant la population vieillit, avec une régression des tranches d’âge correspondant à la population active, tandis que la proportion des 60 ans et plus augmente, passant de 32,7% de la population en 2009 à 36,9% en 2020.

Une partie non négligeable des résidents qui travaillent ont un emploi dans d’autres zones d’emploi. Parmi les salariés, environ un tiers la travaille dans d’autres zones d’emploi 6 (33,2% en 2006 et 33,8% en 2020, selon les données de l’Insee1) et une bonne partie est employée dans la zone de Toulouse (14,1% du total en 2006, 18,1% en 2020).

L’emploi salarié régresse entre 2006 et 2020, passant de 21026 à 20920 dans les données Urssaf, notamment en son centre (la communauté de communes « Cœur et Coteaux du Comminges » qui perd plus de 500 emplois sur cette période). Le secteur spécifique (17) « Industrie du papier et du carton » qui correspond à l’usine de cellulose, bien connue des habitants de Saint-Gaudens, passe de 799 à 548 emplois. Enfin, la ville centrale connaît aussi des difficultés liées au développement d’une très grande zone commerciale à sa périphérie.

La zone connaît donc une régression des emplois salariés industriels et de l’emploi salarié en général, tout en voyant un accroissement du lien avec Toulouse.

Si l’on adopte une perspective historique, Saint-Gaudens, sous-préfecture et centre du Sud Comminges, illustre de façon presque caricaturale un virage industriel manqué dès l’après-guerre. À cette époque, des espoirs étaient nés de l’exploitation du gaz naturel de Saint-Marcet, ce qui a pu faire croire jusqu’aux début des années 1950 en un avenir pétrolier, avec un projet d’usine de dégazolinage, porté à l’époque par l’ancêtre d’Elf (la RAP : la régie autonome des pétroles). Toutefois, celui-ci s’implante finalement à Boussens en raison d’un refus aujourd’hui avéré des édiles locaux de l’époque à Saint-Gaudens d’accueillir des activités industrielles sur leur territoire, par crainte de favoriser l’essor d’une population ouvrière avec un vote politique (communiste) qui leur soit défavorable. La municipalité courra ensuite après un destin industriel en se battant pour accueillir en 1960 l’usine de cellulose, qui depuis a souvent été marquée par des crises endémiques avec reventes et rachats successifs.

De son côté, Boussens a bénéficié un temps de l’activité gazière sous l’égide d’Elf jusqu’au début des années 1970 (usine de dégasolinage, usine d’enfûtage du gaz, laboratoire géologique, centre de formation des ouvriers du gaz et du pétrole). Toutefois, retenir une si grande entreprise (Elf en l’occurrence) s’est avéré impossible pour Boussens. Cette dernière a vu la compagnie pétrolière transférer la totalité de ses actifs à Pau au cours des années 70 avec le développement du gisement gazier de Lacq et l’influence politique du maire de Pau (A. Labarrère) , qui propose un centre de recherche en liaison avec les efforts locaux portés sur le développement de l’Université de Pau.

Finalement, Boussens (1 100 habitants), petit pôle d’industries lourdes, polluantes et à risques au sud de la Haute-Garonne, a modifié un peu son image grâce à la déconcentration des activités depuis Toulouse en 1983. Cette réorientation, soutenue par des financements publics– (État, Région) en compensation du départ d’Elf, a permis l’installation de Continental avec une unité  de production de capteurs pour l’industrie automobile (350 emplois dont 70 intérimaires en 2024).La métropole a ainsi conféré une continuité à la vocation industrielle de Boussens, alors qu’à proximité, Saint-Gaudens regagne certes de la population depuis quelques années mais creuse plutôt une spécialisation dans une économie résidentielle. Néanmoins, de nouvelles perspectives industrielles émergent avec les projets de diversification de Fibre Excellence dans des productions biosourcées …

En comparaison, dans la zone voisine de la basse Ariège (secteur de Saverdun-Pamiers), le tissu industriel du piémont pyrénéen ariégeois manifeste un plus grand dynamisme en termes de création d’emplois, notamment dans la sous-traitance d’usinage aéronautique, avec un lien prégnant à Toulouse et à ses donneurs d’ordres (Airbus, ATR). Le secteur bénéficie également d’un lointain héritage des métiers de forge de fer du val d’Ariège, avec des entreprises spécialisées dans l’usinage des métaux durs pour l’aéronautique (titane, tungstène, chrome, etc…), alors implantées dans le

triangle Pamiers-Mazères-Saverdun. Ce potentiel ariégeois autour de la sous-traitance aéronautique dans le travail des métaux fonde des différences marquées entre Saint-Gaudens et Saverdun-Pamiers aux plans des dynamiques de l’emploi industriel.

Foix-Pamiers

 La vallée de l’Ariège est l’un des principaux axes de sortie de l’agglomération toulousaine vers les Pyrénées. Elle connaît un certain maintien de l’emploi, grâce à la présence d’administrations et des services, mais aussi à l’existence d’une activité industrielle. La part des résidents qui travaillent dans la zone de Toulouse s’accroît.

Carte extraite de Insee Dossier Midi-Pyrénées n° 2, 2014

On retrouve des tendances assez similaires à celles qui s’observent dans toutes les zones d’emploi de l’Occitanie-Ouest, en dehors de l’agglomération toulousaine, avec un accroissement relativement important de la tranche des 60-74 ans. Du côté des emplois salariés, les effectifs croissent légèrement entre 2006 et 2022, particulièrement à Pamiers (5926 à 7062 salariés) et Mazères (1241 à 1541). À l’inverse, la communauté des Portes d’Ariège Pyrénées connaît une régression du nombre de salariés, surtout à Lavelanet (1357 à 1139), Villeneuve d’Olmes (464 à 119) et Bélesta (119 à 68). Sur le plan des types d’activités, la croissance de l’emploi sur la période récente est portée par le commerce, les emplois administratifs, l’hébergement et la restauration ainsi que la construction, tandis que les transports régressent. Par ailleurs, la part des salariés résidant dans la zone et travaillant dans celle de Toulouse s’accroît (de 10% à 13,3%).

On peut comparer cette zone à celle de Saint-Gaudens dans la mesure où il s’agit des deux vallées qui relient l’agglomération toulousaine aux Pyrénées. On observe des similitudes dans l’accroissement du nombre de salariés résidant sur place et travaillant dans la zone de Toulouse, ce que l’on peut lire comme un signe d’étalement de l’aire de résidence des actifs toulousains, dont le nombre croît assez rapidement.  

En revanche, on peut noter des différences significatives dans les évolutions des secteurs d’emplois industriels, de services à l’industrie et au domaine tertiaire. À Saint-Gaudens, nous voyons de faibles évolutions (voire des stagnations) ou des régressions (comme à la Cimenterie Lafarge, Atesco, Fibre Excellence…) et assez peu de sous-traitance aéronautique dans le travail des métaux. À l’inverse, dans la zone de Pamiers-Foix, le tissu industriel présente un peu plus de dynamisme pour la création d’emplois (par exemple pour les équipements électriques ou informatiques) mais aussi dans la sous-traitance d’usinage aéronautique et le travail des métaux dans le secteur des Portes de l’Ariège (même si le vieux bassin industriel textile de Lavelanet subit toujours une crise endémique). Le travail des métaux (CH, Métallurgie et fabrication de produits métalliques) connaît une certaine croissance dans le secteur des Portes de l’Ariège : nous passons de 970 emplois en 2006, soit 10,9% des emplois de la communauté de communes, à 1357 (13,4%) en 2018, avant de redescendre à 1247 en 2022 (11,4%). Cette évolution comprend probablement des entreprises sous-traitantes du secteur aéronautique, comme Aubert et Duval (900 emplois à Pamiers), établissement de forge et matriçage, désormais passé sous le contrôle d’Airbus et de Safran dans le but de sécuriser leur chaîne d’approvisionnement pour l’usinage des métaux durs (titane).

[1] Dans les données de la « Base tous salariés), la proportion réciproque de personnes travaillant dans la zone d’emploi de Saint-Gaudens et résidant dans d’autres zones est plus proche du quart (23,3% en 2006, 26,7% en 2020), la plus grosse part résidant dans la zone de Toulouse (11,7% en 2006, 13,2% en 2020), mais une autre part étant plutôt dans celle de Tarbes-Lourdes (6% et 6,5%).


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Michel Grossetti Jean-Marc Zuliani (6 mars 2025). Les vallées entre Toulouse et les Pyrénées : stagnation ou déclin économique et connexion accrue à l’agglomération toulousaine. L'ŒIL DU LINQS. Consulté le 15 novembre 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13fdj


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