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Toulouse, une « métropole » « à succès » face aux crises

Toulouse est depuis près de quarante ans l’une des grandes villes françaises connaissant une croissance économique et démographique importante. Cette situation, qui est le fruit de politiques locales et nationales antérieures aux années 1970, fait de cette ville un bon exemple des problèmes auxquels sont confrontées les grandes agglomérations françaises dans le contexte des crises actuelles. Le présent projet a pour objectif d’analyser les évolutions de la population et des emplois, et de leur organisation spatiale, au sein de l’espace de l’agglomération et de la région qui l’environne (l’ancienne région Midi-Pyrénées ou Occitanie Ouest). Il s’agit d’une recherche collaborative engagée conjointement par des chercheurs en sciences sociales et des citoyens, dans le cadre d’un dispositif de science citoyenne du LabEx “Structurations des Mondes Sociaux”. Le texte qui suit est une première synthèse des travaux conduits dans le cadre de cette recherche, une analyse plus détaillée est accessible en téléchargement à la fin du texte.

Principaux enseignements

Nous avons utilisé différents corpus de données publiques pour analyser les évolutions de l’emploi dans les zones d’emploi de l’Occitanie Ouest, les inégalités de revenu au sein de l’agglomération et dans certains autres espaces, ainsi que la composition sociale des établissements scolaires publics et privés.

Le principal enseignement de cette étude est que les tendances déjà identifiées se sont pour l’essentiel poursuivies

C’est en particulier le cas sur le plan économique. L’agglomération toulousaine connaît une croissance relativement forte de l’emploi et présente un profil plus industriel que la plupart des autres grandes villes. Les dynamiques industrielles se poursuivent sur des bases anciennes : développement des activités de conception, en lien avec les secteurs aéronautique et spatial, mais touchant aussi d’autres secteurs (électronique automobile, internet des objets et intelligence artificielle entre autres) ; développement des activités liées à la santé (biopharmaceutique et oncologie) ; services aux entreprises et à la personne tant génériques que spécialisés et caractéristiques d’une grande ville en expansion ; plus aujourd’hui diverses activités émergentes (recyclage, énergies renouvelables…) en lien avec les enjeux de transition climatique. Cette croissance économique n’empêche nullement le maintien d’un taux de chômage non négligeable et de poches de pauvreté. Les autres territoires de la région de l’Ouest Occitanie (ex-Midi-Pyrénées) examinée sont relativement peu dépendants les uns des autres et surtout de la grande agglomération qui en forme le centre géographique. Chaque système économique local (il peut y en avoir plusieurs sur un même territoire) a sa propre dynamique, liée à des spécialités économiques et industrielles spécifiques. On n’observe pas de « ruissellement territorial » qui verrait les autres espaces bénéficier de la croissance de l’agglomération toulousaine alors que s’amorceraient au contraire des liens empreints de réciprocité entre le pôle toulousain et certaines villes moyennes proches (en savoir plus sur Saint-Gaudens et Foix-Pamiers). Les données montrent aussi que ces zones ne peuvent absolument pas être rangées dans une catégorie générique qui les renverraient à leur statut de périphérie géographique d’une grande ville. Certaines connaissent une croissance économique soutenue tandis que d’autres stagnent ou régressent et les activités notamment industrielles qui y prennent place sont très variées.

Les tendances se poursuivent aussi en ce qui concerne les inégalités socio-spatiales. L’agglomération toulousaine est caractérisée depuis longtemps par de fortes inégalités sociales entre les quartiers, alors même que sa population d’ensemble ne présente pas de disparités particulièrement élevées. Pour le dire autrement, les inégalités de revenu à l’échelle de l’agglomération dans son ensemble ne sont pas plus élevées qu’ailleurs (elles sont même modérées par comparaison avec ce que l’on observe dans d’autres grandes villes), mais leur inscription dans l’espace urbain est marquée par des contrastes particulièrement marqués entre les quartiers. Les disparités entre quartiers s’accroissent, ceux qui accueillent des populations favorisées voient celles-ci s’enrichir et ceux dont le revenu moyen est faible ont tendance à s’appauvrir.

Les inégalités sont renforcées par une différenciation croissante des établissements scolaires, avec une augmentation de la concentration des élèves issus des couches favorisées dans les établissements privés. L’écart social entre ces établissements et ceux du secteur public se creuse. Les établissements privés étant concentrés dans certaines parties du territoire de l’agglomération, cela accroît les inégalités entre quartiers.

L’agglomération toulousaine est aussi caractérisée depuis longtemps par un étalement urbain particulièrement élevé dont la conséquence est la difficulté d’avoir un système de transport public efficace pour toute la population, un usage massif de l’automobile, l’engorgement du trafic et la pollution de l’air. Malgré le développement du réseau de transport public et la perspective d’un RER métropolitain à terme, cette tendance persiste. Aux tendances existantes à l’étalement s’ajoute le phénomène plus récent de renchérissement des prix du logement dans la ville centre, qui pousse de plus en plus de ménages de classes moyennes à s’en éloigner. La part des familles avec enfants a ainsi tendance à baisser dans Toulouse, la natalité y étant également en régression depuis plusieurs années, ce qui constitue une inflexion des tendances antérieures.

Nous n’avons pas traité en détail la question du logement et des effets du réchauffement climatique, mais les tendances aperçues au cours de cette étude invitent à une réflexion approfondie sur cette question.

Il apparait également au vu de nos recherches, que ce territoire ne dispose pas d’un observatoire coordonné se référant aux grands enjeux identifiés ci-dessus, même si de nombreux travaux de grande qualité sont réalisés par divers organismes. Les travaux de la cellule prospective de la Région Aquitaine ou de l’Observatoire Social de Nantes pourraient à ce titre servir d’exemple.

Journée d’étude du 24 janvier 2025

L’évolution socio-économique récente de Toulouse et de l’Occitanie-Ouest


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Laboratoire des idées sur les Nouvelles Questions Sociales (LINQS) (14 octobre 2024). Toulouse, une « métropole » « à succès » face aux crises. L'ŒIL DU LINQS. Consulté le 15 novembre 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/12hgm


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